19 juillet 1873.
Le port et la « basse ville » de Toulon sont en ébullition. Un bagnard s’est échappé !
Journalistes venu·es des quatre coins de la France, vous êtes ici pour assister aux derniers jours du Bagne. Voué à la fermeture, il verra ses derniers condamnés déportés à Cayenne, en Guyane.
Partez sur les traces de François FOUACHE, le fugitif, et découvrez son passé !
D’abord attiré par l’imposante et ancienne fontaine dite « de la hall aux grains », votre regard ne peut manquer de remarquer, au numéro 14 du côté Est, un mascaron entouré de 4 signes bien connus des amateurs de cartes à jouer : Pique – Cœur – Carreau – Trèfle.
Deux hommes ouvrent la porte, jettent un regard circulaire sur la place et, après s’être assurés qu’aucune tête connue ne traînait dans les parages, ils sortent du bâtiment et s’attablent à la terrasse la plus proche.
Le plus petit frise la cinquantaine. Son costume à fines rayures donne le change tant qu’on l’observe de loin, mais un examen plus approfondi révèle des traces d’usure et de nombreuses reprises. La coupe de cheveux de monsieur est plus soignée et plus fraîche que celle de son costume.
Le jeune homme assis en face de lui est plus grand mais pas plus fortuné. Sa veste n’est pas assortie à son pantalon et ses chaussures semblent un peu trop serrées…
« Tu as vu qui a débarqué à 15h30 ?
_ Difficile de le manquer. On aurait dit un revenant !
_ Pourtant, il m’a semblé moins livide que le petit Jules !
_ En même temps, il ne devait pas s’attendre à le voir revenir ! En tout cas, pas de si tôt !
_ Pourquoi ne l’a-t-il pas fait rentrer ?
_ Aucune idée, mais tu as vu les regards qu’il jetait partout dans la salle ? Il semblait redouter d’y voir quelqu’un…
_ Quand je pense qu’à l’époque, ils étaient inséparables tous les quatre !
_ « À l’époque »… Comme tu exagères ! C’était il y a quoi, deux ? Trois ans tout au plus ! On ne l’avait jamais vu dans les parages, avant, le FOUACHE !
_ Mais une fois qu’il a mis le pied ici…
_ Un peu comme nous…
_ C’est sûr. Mais ça reste moins dangereux que l’opium, non ? J’ai un ami qui a essayé, dans l’une des nombreuses fumeries clandestines de la basse ville. Il m’a dit…
_ Il t’a dit rien du tout. Ne l’écoute plus et ne lui parle plus. Contente-toi du vice du jeu, c’est suffisant et c’est moins mauvais pour la santé.
_ Moins mauvais, moins mauvais, ça dépend. Quand tu as le malheur de perdre et que tu continues à jouer…
_ … et que tu empruntes aux mauvaises personnes…
_ Comme si tu pouvais emprunter à de bonnes personnes ! Si tu prêtes de l’argent, c’est qu’on ne peut te prêter de bonnes intentions !
_ Et FOUACHE, il avait emprunté ?
_ Pardi ! Il devait même une sacrée somme !
_ Ça peut pousser un brave gars comme lui à faire n’importe quoi, non ?
_ Tu l’as dit. Quand ta vie est en danger… Tu perds un peu la tête ! »
Le serveur dépose devant les deux hommes deux petits verres au fond desquels danse un liquide jaunâtre et visqueux, qu’ils coupent d’un peu d’eau.
« À la santé de FOUACHE, LACOMBE, LAFITTE et LASSERRE ! »
En poussant la belle et lourde porte en bois clair du n°14, vous accédez à un hall et un petit escalier dont les lattes grincent un peu.
Après avoir tapé trois coups longs et deux coups brefs, vous voyez la porte s’entr’ouvrir. Un vieil homme rasé de près vous détaille de ses yeux délavés avant de vous laisser entrer.
« C’est l’heure creuse. Vous avez de la chance. Va pour une partie ou deux, mais pas plus. Après, les habitués vont arriver. C’est 2 Francs pour s’installer à une table. C’est 1 Franc pour un verre de vin. »
Il vous indique une table d’un geste sec. Il revient avec vos verres et empoche d’une main rapide vos quelques pièces.
« Voilà pour les consommations. La suite pour les informations. »
Vos nouvelles pièces rejoignent les anciennes.
« FOUACHE ? Au Bagne, pour ce que j’en sais. Les bagnards vont tous partir pour Cayenne, bientôt. Feront pas de vieux os. Un étourdi, le FOUACHE. Pas le dernier à oublier sa casquette en partant…
LACOMBE ? Un grand roublard, mais pas un méchant. Le roi du bonneteau. Capable de perdre beaucoup pour gagner encore plus. Mais réglo avec les siens.
LAFITTE ? Pas le plus futé mais le plus fidèle. Le p’tit qu’était là tout à l’heure. L’a ouvert à je-sais-pas-qui. J’étais au comptoir. Trop loin. Pas vu. La pendule sonnait trois heures et demie.
LASSERRE? Un autre p’tit. Longtemps un mauvais payeur. BOUSCATIER a failli lui casser les deux jambes, pour l’exemple. L’a amadoué avec « du bon argent venu de Marseille ». Marseille ou Tombouctou, du moment que ça rembourse… »
Au moment de sortir, vous vous retrouvez face à un habitué qui vous tire par la manche pour vous inviter à vous attabler quelques minutes.
Un ballon de rouge lui ravive la mémoire.
« On l’a plus vu par ici depuis le soir du 10 mars 1871, votre FOUACHE. Il a laissé en plan ses 3 acolytes vers 19h. Il n’avait pas l’air dans son assiette. Il en avait même oublié sa casquette. Les autres ont essayé de continuer de jouer mais, faute d’un 4ème valable, ils ont lâché l’affaire. LAFITTE est resté boire des canons ici. Il avait pas le moral. LACOMBE et LASSERRE sont partis vers 20h pour je sais pas où… »
Il attrape un paquet de cartes et vous préférez partir avant qu’il ne vous propose une partie avec lui.
Retrouvez ici le plan indiquant les différents lieux d’enquête.